Adolescent, j’ai commencé à fabriquer des musiques avec peu de compétences et de moyens techniques. Je réalisais croquis et prises de son avec les moyens du bord. J’étais dans un autre monde, celui de la magie de voir les choses prendre forme, de l’émotion qui palpite confortablement installé dans ma chambre au-dessus du garage. Par la suite, lors des premiers enregistrements dans un vrai studio, j’ai ressentis quelque-chose entre émerveillement et déception. Emerveillement du son précis et puissant mais de la même manière qu’on perçoit différemment sa propre voix enregistrée, je reconnaissais à peine les couleurs. Et pour cause, un enregistrement audio est une photographie, des paquets de secondes figées sur la bande. Et c’est très différent de photographier avec un gros objectif sous la lumière blanche de projecteurs dans une situation plus stressante et inconfortable que de photographier à l’appareil jetable dans la chaleur enfumée d’une chambre sous les pentes d’un toit, d’une nuit de dimanche soir pluvieux de l’hiver.
Comment concilier le bon appareil photo dans la bonne ambiance pour obtenir l’odeur envoutante du bon petit plat qui mijote ? Je ne crois pas qu’un tel livre de recettes existe, en revanche on peut axer le travail sur la configuration de l’enregistrement pour que l’instantané saisi dégage les saveurs de ce qui s’y mijote. La qualité d’une production audio provient aussi de sa démarche, de sa capacité relier technologie et l’émotion, situation acoustique et intention, instinct et technique, instantanée et traitements audio.